Information juridique pour les auteurs | Kobo Writing Life France

Quels sont les éléments juridiques à connaître pour créer son site internet d’auteur ?

Pour vous faire connaître en tant qu’auteur·rice, et faire connaître vos ouvrages autoédités, vous avez (ou allez) peut-être créé(er) votre propre site. Qui ne rêve pas d’avoir son site internet du style http://www.prénom-nom.com ou bien http://www.votrepseudnoyme.com ? Avoir un site internet permet de se professionnaliser.

Aujourd’hui, nous n’allons pas parler de l’ouverture d’un site et des différentes plateformes existantes. Nous allons parler plutôt des éléments juridiques à prendre en compte dans l’ouverture et la gestion de votre site internet d’auteur·rice.

La recherche d’antériorité des noms de domaine

Le nom de domaine, c’est ce qui suit le « www. » ou le « https:// ». C’est le signe distinctif qui vous identifiera auprès de vos (potentiels) clients. Techniquement, deux personnes ne peuvent pas avoir le même nom de domaine. Toutefois, deux personnes peuvent avoir des noms identiques ou similaires et/ou des extensions différentes. Les extensions, ce sont les « .com », « .fr », « .eu », etc. 

Tout comme vous devez effectuer une recherche d’antériorité pour choisir le titre de votre livre, vous devez effectuer des recherches d’antériorités pour vérifier qu’il n’existe pas un autre nom de domaine qui serait semblable au vôtre et/ou avec une extension différente. L’idée sous-jacente est de ne créer aucune contrefaçon (= aucun plagiat), aucune concurrence déloyale (au sens où un client ne doit pas pouvoir se tromper de site et acheter chez vous alors qu’il pensait acheter le livre d’un autre auteur) et aucun parasitisme économique (c’est-à-dire qu’il ne faut pas se servir de la notoriété ou des efforts d’une autre personne pour se faire connaître). 

Vous pouvez commencer votre recherche par le biais d’annuaires de noms de domaine (tel que le « WHOIS » de l’AFNIC). Ensuite, il faut également penser à vérifier les annuaires d’entreprises et de sociétés (tels qu’Infogreffe ou societe.com). Pensez aussi à vérifier les marques déposées (via le site data.inpi.fr). Vous pouvez aussi regarder dans les bases de données de la BnF et sur les sites de vente en ligne de livre pour vérifier qu’aucun autre auteur ne porte le même nom ou le même pseudonyme que vous, si vous souhaitez ouvrir le site à ce nom.

Une fois ces recherches effectuées, il vous faudra évaluer les risques éventuellement en présence. Est-ce que la personne est dans le même secteur d’activité que vous ? Est-ce que ces livres sont dans le même genre ? Etc. 

Enfin, lorsque vous réserverez votre nom de domaine, il est souvent juridiquement conseillé de réserver un même nom dans plusieurs extensions différentes et dans plusieurs variantes différentes. Cela évitera ensuite que quelqu’un acquière le même nom que le vôtre. Par exemple, Marie Martin peut réserver les noms de domaine suivants : marie.martin.com, marie-martin.com, marie.martin.fr, marie-martin.fr, etc. 

Créer des mentions légales

Une fois votre nom de domaine choisi et votre site créé, vous allez devoir y ajouter des mentions légales. Les mentions légales constituent la carte d’identité de votre site internet. Elles permettent à l’internaute de vous identifier.

En vertu de la loi pour la confiance dans l’économie numérique du 21 juin 2004, ces mentions légales sont obligatoires, pour tout site internet, qu’il émane d’un particulier ou bien d’un professionnel. Même un simple blog amateur requiert des mentions légales.

Les mentions légales sont strictement règlementées par la loi. Doivent ainsi figurer : 

  • L’identité de l’éditeur du site (obligatoire pour tous). L’éditeur du site, c’est vous. > Si vous êtes une personne physique (artiste-auteur, micro entrepreneur, entrepreneur individuel classique, particulier) : votre nom + votre prénom + votre adresse postale complète + votre adresse email + votre numéro de téléphone (+ votre numéro de TVA intracommunautaire si vous en avez un).
    > Si vous êtes une personne morale (société, association, etc.) : votre dénomination sociale + votre forme juridique (SAS, SASU, SARL, EURL, etc.) + l’adresse postale complète de votre siège social + le montant de votre capital social + votre adresse email + votre numéro de téléphone (+ votre numéro de TVA intracommunautaire si vous en avez un).
  • Le nom du directeur de la publication (obligatoire pour tous) : cela peut être vous en tant que personne physique, ou bien une société affiliée, etc.
  • L’identité de l’hébergeur du site (obligatoire pour tous) : la dénomination sociale de la société d’hébergement + l’adresse postale complète de son siège social + son numéro de téléphone.
  • Si vous exercez une activité commerciale et/ou artisanale : votre numéro d’inscription au registre du commerce et des sociétés (RCS) et/ou votre numéro d’inscription au répertoire des métiers (RM).
  • Si vous exercez une profession règlementée dont vous parlez sur votre site internet (exemples : avocat, médecin, etc.) : vous devrez inscrire des références aux règles professionnelles qui vous sont applicables ainsi qu’à votre titre professionnel.  
  • Si vous exercez une profession soumise à une autorisation d’exercer et que vous parlez de cette profession sur votre site internet : vous devez inscrire le nom et l’adresse de l’autorité vous ayant délivré cette autorisation. 

En cas d’absence de mentions légales ou de mentions légales incomplètes, la loi prévoit des sanctions : jusqu’à un an d’emprisonnement et 75 000 € d’amende (pour les personnes physiques). Cette amende peut être multipliée par cinq pour les personnes morales.

Créer des Conditions Générales d’Utilisation (CGU) et mentionner les traitements et l’utilisation des données à caractère personnel

Les Conditions Générales d’Utilisation (CGU), ce sont les conditions qui sont relatives à l’utilisation de votre site internet, de votre blog, de votre éventuelle newsletter, etc.

Elles précisent les conditions d’accès au site, de sa maintenance. Elles précisent aussi votre responsabilité. Elles peuvent également inclure des mentions concernant la propriété intellectuelle. 

Les CGU expliquent également comment sont utilisées les éventuelles données personnelles que vous pouvez collecter. Selon la loi, une donnée à caractère personnel est une information qui peut être utilisée pour identifier une personne directement ou indirectement, et ce, à partir d’une seule donnée ou à partir d’un croisement de données. Par exemple, les coordonnées d’une personne constituent des données personnelles. Pour respecter les obligations relatives aux données personnelles, vous devez :

  • Collecter uniquement celles dont vous avez besoin, et éviter de collecter des données inutiles.
  • Ne collecter des données que dans une finalité précise (exemple : envoyer une newsletter). 
  • N’utiliser les données collectées que pour le but initialement fixé. Par exemple, on n’envoie pas de documentation commerciale à une personne qui vous avait contacté précédemment pour un simple conseil d’écriture.
  • Sécuriser les données collectées pour empêcher tout accès non autorisé.
  • Conserver les données pour une durée limitée que vous devez fixer.
  • Informer les internautes que vous pouvez collecter leurs données personnelles.
  • Informer également les internautes de la nature des données que vous collectez .
  • Obtenir le consentement de la personne dont les données sont collectées (par exemple par le biais d’une case à cocher lors de l’inscription à votre newsletter).
  • Répondre aux demandes des internautes souhaitant exercer leurs droits (rectification, modification, suppression de données, par exemples).

Vos CGU décrivent aussi votre système de cookies. Un cookie est un élément d’identification déposé sur l’ordinateur de l’internaute qui permet de collecter des informations le concernant (comme ses habitudes de fréquentation de site, ses heures de connexion, etc.).

Les CGU peuvent intégrer vos mentions légales en préambule. Ainsi, il n’est pas forcément nécessaire que vous ayez deux onglets séparés pour les mentions légales et les CGU.

En cas d’absence de CGU ou si elles sont incomplètes, il peut y avoir des sanctions, notamment en ce qui concerne la collecte des éventuelles données personnelles. À titre d’exemple, le traitement informatique des données recueillies sans consentement est puni de 5 ans d’emprisonnement et de 300 000 € d’amende.

Créer des Conditions Générales de Vente (CGV) si vous vendez votre livre ou d’autres produits directement sur votre site internet

Les Conditions Générales de Vente (CGV) sont les conditions relatives à votre business en ligne. Elles sont obligatoires dès lors que vous vendez quelque chose sur votre site internet.

Elles contiennent les conditions de prix, de paiement, de livraison, les conditions de rétractation, les garanties que vous êtes tenu d’offrir au client, les conditions d’ouverture d’un compte sur le site, etc. Les CGV contiennent en outre une clause concernant les données à caractère personnel que vous allez collecter et utiliser pour le traitement de la commande.

L’absence de CGV est sanctionnée par une amende administrative de 15 000 € pour une personne physique (artiste-auteur, micro-entrepreneur, entreprise individuelle classique). Cette amende passe à 75 000 € pour une personne morale (société, association, etc.). 

Il existe un certain nombre de mentions qui sont obligatoires dans vos CGV. Nous allons ci-après en lister quelques-unes.

Le délai de rétractation

Le Code de la consommation impose au vendeur de garantir un délai de rétractation. Le client dispose alors d’un délai de 14 jours à compter de la réception des produits pour exercer son droit de rétractation auprès du vendeur, sans avoir à justifier de motifs ni à payer de pénalité. Le vendeur est tenu de faire droit à la rétractation et doit rembourser le client de la totalité des sommes versées, y compris les frais de livraison, au plus tard dans les 14 jours à compter de la date à laquelle la rétractation a eu lieu.

La garantie légale de conformité

Les ventes de biens réalisées avec des clients consommateurs sont soumises à la garantie légale de conformité décrite par le Code de la consommation. Un défaut de conformité est constaté dans l’une des situations suivantes : le bien ne correspond pas à la description donnée par le vendeur (même s’il fonctionne parfaitement), ou il est impropre à l’usage habituellement attendu, ou il ne possède pas les qualités annoncées, ou il présente un défaut de fabrication, une imperfection ou un mauvais assemblage. Dans ces cas, le client n’a pas besoin de prouver l’existence du défaut de conformité et peut choisir directement entre la réparation (si elle est possible) ou le remplacement du bien.

Cette garantie est gratuite et est d’une durée légale de deux ans après la délivrance du bien. 

La garantie des vices cachés

Cette garantie est elle aussi obligatoire en vertu du Code civil. Pour pouvoir mettre en œuvre la garantie des vices cachés, trois conditions cumulatives doivent être réunies : le défaut doit exister au moment de l’achat (et donc ne pas survenir après), il doit être non apparent lors de l’achat, et enfin il doit rendre le bien inutilisable ou diminuer très fortement son usage.

C’est au client de prouver l’existence du vice caché. Cette garantie est gratuite et limitée au remplacement ou au remboursement des biens. Elle n’est pas valable si les biens ont été utilisés de manière anormale ou incorrecte. Le client doit informer le vendeur de l’existence des vices dans un délai de deux ans à partir de la découverte du défaut. La durée de cette garantie est limitée à cinq ans après l’achat.

Le médiateur à la consommation

La médiation de la consommation est une solution amiable pour résoudre un litige entre un client et un professionnel, avec l’aide d’un médiateur.

En clair, s’il survient un litige entre vous, votre client peut saisir un médiateur à la consommation. Il n’est pas obligé de le faire : il s’agit d’une simple faculté.

Néanmoins, cela induit pour vous une obligation de signer un contrat avec un médiateur. Depuis 2016, tous les professionnels sont obligés de contracter avec un médiateur à la consommation, peu importe la taille de leur entreprise et leur secteur d’activité. Ainsi, même en tant qu’auteur pouvant vendre exclusivement votre ouvrage autoédité sur votre site internet, vous êtes concerné (vous n’êtes en revanche pas concerné si vous vendez votre ouvrage sur des plateformes telles que Kobo Writing Life). 

Vous devez ainsi choisir un médiateur agréé parmi la liste disponible sur le site du ministère de l’Économie. Ensuite, vous devez le contacter, établir un contrat avec lui et payer des frais annuels ainsi que des frais additionnels pour chaque médiation effectuée. Les tarifs et la durée des contrats varient selon les médiateurs.

Dans vos CGV, il est donc impératif de mentionner le nom et les moyens de contact du médiateur avec qui vous aurez contracté. Il n’est pas possible de mentionner le nom d’un médiateur sans avoir signé de contrat avec lui.

Si vous ne contractez pas avec un médiateur et si vous ne le mentionnez pas dans vos CGV, vous risquez une amende administrative pouvant aller jusqu’à 3 000 euros pour les personnes physiques (artiste-auteur, micro-entrepreneur, entrepreneur individuel), et jusqu’à 15 000 euros pour les personnes morales (sociétés).

Quelques conseils pour rédiger vos mentions légales, vos CGU et vos CGV

Le premier réflexe qu’ont souvent les personnes désirant rédiger cette documentation est de se tourner vers des modèles gratuits « trouvés » sur Internet. Mais c’est bien souvent une mauvaise solution, car il est difficile d’en connaître la provenance (est-ce qu’ils ont été rédigés par un professionnel du droit ?), et il est souvent difficile de les dater (est-ce que ces modèles sont à jour des dernières législations ?).

Le second réflexe est bien souvent de faire des copier/coller d’autres sites. Mais là aussi, il s’agit d’une mauvaise solution, car les autres personnes n’ont pas forcément le même site internet que vous, ne collectent pas forcément les mêmes données, ne vendent pas forcément les mêmes choses. De plus, ces personnes ont peut-être elles-mêmes commis des erreurs de rédaction. 

Enfin, il s’agit d’une pratique qui peut être sanctionnée par la justice, car les CGU et les CGV peuvent être protégées par le droit d’auteur et par la législation sur la concurrence déloyale et le parasitisme économique. En avril 2022, une plateforme d’autoédition a d’ailleurs été condamnée pour avoir repris les CGV d’une autre plateforme. Il s’agit donc d’une pratique à éviter.

Le mieux est donc de faire appel à un juriste (pour avoir des modèles solides et complets) ou à un avocat (pour avoir une rédaction personnalisée). Cette documentation ne s’improvise pas et il est donc plus prudent d’en laisser la rédaction à une personne du métier afin d’éviter tout impair.

Si besoin est, vous pouvez me contacter pour toute demande de devis afin d’obtenir des modèles de documents.


Elvire Bochaton est juriste en Droit de la Propriété Intellectuelle et plus particulièrement en droit de l’édition et de l’autoédition. Elle a travaillé avec plusieurs maisons d’édition. Elle a conçu le Guide de Survie Juridique pour Écrire et Publier son Livre qui réunit les 100 questions juridiques principales fréquemment posées durant le processus d’écriture, la publication et la post-publication d’un livre. 
Dans le cadre de ses activités, Elvire Bochaton délivre de l’information juridique aux auteurs par email et par téléphone, réalise des conférences et des formations sur-mesure pour les particuliers et les entreprises et rédige des modèles de contrats et de documents juridiques.
Dans la pratique de son métier, rendre le droit accessible pour tout public est l’une de ses priorités. Selon elle, le droit est un moyen pour concrétiser ses projets et ne doit plus être perçu comme une contrainte. Vous pouvez la contacter en cas de besoin.
Son site internet : www.elvire-bochaton.com
Son compte Instagram : https://www.instagram.com/livre_legalite/

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