Information juridique pour les auteurs | Kobo Writing Life France

Comment organiser un concours pour promouvoir mon livre autoédité ?

Beaucoup d’auteurs autoédités organisent des concours sur les réseaux sociaux pour faire gagner leur livre, une dédicace, une rencontre, ou bien d’autres cadeaux. L’organisation de concours est une technique utile pour promouvoir un livre autoédité, car à ce moment-là, vous allez pouvoir toucher un public qui ne vous connaissait pas forcément. Et cela pourrait également donner envie aux personnes qui n’auront pas gagné votre livre, de peut-être l’acheter par eux-mêmes. 

Mais comment s’y prendre pour organiser un concours de manière légale ? Et puis au fait, c’est quoi un concours exactement ?

Quelques définitions

Un concours : un concours est un jeu dont le but est que les participants puissent démontrer leurs compétences, ou fassent preuve d’un talent particulier, d’une habileté, d’une connaissance ou d’une créativité pour gagner un prix. La désignation des gagnants s’effectue sur une appréciation, à l’aide d’un classement personnel ou réalisé à par un jury.

Une loterie

La loterie est définie par la loi comme une opération promotionnelle « tendant à l’attribution d’un gain ou d’un avantage de toute nature par la voie d’un tirage au sort, quelles qu’en soient les modalités, ou par l’intervention d’un élément aléatoire » (article L.121-20 du Code de la consommation). Ce qui caractérise ainsi principalement la loterie, c’est l’intervention de la chance, c’est-à-dire l’aléa qui pèse sur l’attribution ou non de la dotation. Dans la loterie, il y a une part de hasard.
Vous l’aurez donc compris, ce que l’on appelle « concours » dans le langage courant, est en fait souvent… une loterie publicitaire.
Pour qu’une loterie soit légale au sens du Code de la consommation, elle ne doit pas être déloyale, c’est-à-dire qu’elle ne doit pas être contraire aux exigences de la diligence professionnelle (qui requiert que l’organisateur de la loterie soit honnête et de bonne foi) (1), ni être de nature à altérer ou être susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du participant consommateur (2) (article L.121-1 du Code de la consommation). La loterie doit en outre ne pas être trompeuse en reposant sur des allégations ou indications fausses, ou bien être agressive au sens où la liberté de participer serait viciée.

Un jeu-concours

Un jeu ou un jeu-concours : ces termes sont souvent employés pour parler de manière générale des loteries publicitaires. Ils n’ont pas de définition légale qui leur est propre. 

Une tombola

Une tombola est une forme de loterie dont la participation est payante. Les tombolas sont autorisées seulement dans la limite où elles permettent de financer des actes ou des activités à but non lucratifs. Elles sont soumises à autorisation. La seule exception concerne les jeux de la Française des jeux, qui sont strictement encadrés.

Les jeux-concours avec ou sans obligation d’achat

Vous avez déjà certainement entendu quelque part l’expression « jeu sans obligation d’achat ». Cette formule avait été popularisée, car jusqu’en 2014, les jeux-concours avec obligation d’achat étaient interdits. Aujourd’hui, les deux sortes de jeux-concours avec obligation d’achat et sans obligation d’achat sont autorisées. Il est donc tout à fait possible de subordonner la participation à un concours à l’achat de votre livre autoédité.

La limite reste la même pour toutes les loteries : le jeu-concours ne doit pas être déloyal au sens du Code de la consommation (voir les deux critères dont nous avons parlé au sein des définitions).

La rédaction d’un règlement de jeu-concours

Avant 2015, il était obligatoire de rédiger un règlement de jeu-concours et de le déposer auprès d’un huissier de justice. Aujourd’hui, cette obligation n’existe plus. Néanmoins, cela ne signifie pas pour autant que cette étape est à négliger. 

Rédiger un règlement de jeu-concours est facultatif, mais permet de cadrer la relation entre vous et les participants. Cela peut vous éviter des litiges ultérieurs et vous permettre de démontrer que votre jeu-concours n’est pas déloyal au sens du code de la consommation.

Alors concrètement, on écrit quoi dans un règlement de jeu-concours?

  • Les dates du concours et sa durée
  • Les restrictions de participation : est-ce que les mineurs avec autorisation parentale peuvent participer, est-ce que l’on peut participer n’importe où dans le monde, est-ce que l’on peut participer plusieurs fois ou seulement une seule fois, etc. ?
  • Les modalités de participation : qu’est-ce que l’on doit faire pour participer et comment le faire ?
  • Les modalités de désignation du ou des gagnants : comment seront sélectionnés les gagnants ? Est-ce un jury selon des critères précis, ou bien un tirage au sort ?
  • Les cadeaux à gagner : le nombre de lots, la description des différents cadeaux, leur prix TTC.
  • Les conditions et modalités pour bénéficier du cadeau : est-ce que l’organisateur du concours contacte le gagnant ? Ou bien est-ce au gagnant de se manifester ? Est-ce que le gain est envoyé par la poste, par email ?
  • Les coûts de participation : avec obligation d’achat, ou sans obligation d’achat, et si le jeu est sans obligation d’achat, mais que la participation engendre tout de même un coût (coût d’une connexion internet par exemple), il faut préciser les modalités de remboursement éventuel de ce coût.
  • Les modalités relatives aux données à caractère personnel traitées. Au sens de la loi, une donnée à caractère personnel est toute information qui permet de rendre une personne identifiée directement ou indirectement ou identifiable à partir d’une seule donnée ou à partir d’un croisement de données. Par exemple, les coordonnées d’une personne constituent des données personnelles, de même que son pseudonyme. En tant qu’organisateur d’un jeu-concours, vous êtes tenu de respecter le Règlement Général sur la Protection des Données (le fameux « RGPD »). Le RGPD pose cinq grands principes que vous devez respecter : 
    • Le principe de finalité vous ne devez collecter des données que dans un but bien précis, légal et légitime.
    • Le principe de proportionnalité et de pertinence : vous devez limiter le nombre de données traitées, c’est-à-dire que vous ne devez demander aux participants ou aux gagnants que les données qui seront uniquement et strictement nécessaires et pertinentes au regard du jeu-concours. Par exemple, si le numéro de téléphone n’a pas d’incidence sur le concours, ne demandez pas le numéro de téléphone des participants ou des gagnants.
    • Le principe d’une durée de conservation limitée : vous ne pouvez pas garder les données indéfiniment. Vous devez définir une durée de conservation en rapport avec le concours. Ne conservez pas les données des participants au-delà de quelques mois après le concours.
    • Le principe de sécurité et de confidentialité : vous devez assurer une sécurité aux données que vous collectez (par le biais d’un mot de passe, et limiter l’accès aux données à votre famille, etc.).
    • Le principe du respect du droit des personnes : les personnes dont les données sont collectées ont un droit d’information, d’accès, d’opposition, de rectification, de suppression, un droit à la portabilité, etc.
  • Les modalités de citation des noms des gagnants : allez-vous communiquer publiquement les noms des gagnants ?
  • Les limites de votre responsabilité : il s’agit généralement d’un article qui stipule que vous n’êtes pas responsable en cas de participation non parvenue, de dysfonctionnement dans l’envoi de la participation, de participation arrivée incomplète, etc.
  • Les modalités relatives aux réclamations : si les participants souhaitent faire une réclamation, pendant combien de temps peuvent-ils le faire ? Et par quel biais ?
  • La législation applicable. Votre règlement est-il soumis au droit français ou à une autre législation ? 
  • L’indication du dépôt du règlement chez un commissaire de justice : si vous choisissez de déposer votre règlement (voir plus bas), vous devez indiquer les coordonnées du commissaire de justice auprès de qui vous l’aurez déposé.

Vous pouvez rédiger ce règlement vous-même, mais en pratique je vous conseille vivement d’acquérir un modèle auprès d’un juriste, ou bien de demander à un avocat de le rédiger pour vous. 

Et le règlement, on le communique comment aux participants?

Les participants doivent être en mesure de prendre connaissance du règlement avant leur participation ou au plus tard au moment de leur participation. L’idéal est donc de pouvoir l’insérer sur la page ou le post du jeu-concours. Si cela n’est pas possible, vous pouvez faire un lien vers un document PDF ou une autre page de votre site internet.

Doit-on déposer son règlement chez un commissaire de justice (huissier)?

Le dépôt est facultatif. Néanmoins, il est toujours utile de déposer son règlement chez un commissaire de justice (depuis 2022, il s’agit du nouveau nom des huissiers de justice). 

Cela lui donne une force probante, car le commissaire va rédiger un procès-verbal. Cela donne une date certaine à votre règlement et prouve que vous ne l’avez pas modifié depuis

De plus, le commissaire de justice va pouvoir aussi relire votre règlement et vérifier qu’il est bien conforme à la règlementation. S’il ne l’est pas, il pourra vous proposer des modifications.

Ensuite, le commissaire de justice peut également vous assister dans votre tirage au sort, ou bien l’effectuer à votre place. La présence d’un tiers pour cette opération est rassurante et est un gage d’impartialité.

Enfin, le commissaire de justice peut vous assister en cas de réclamation d’un participant. Le recours à un commissaire de justice coûte entre 100 et 500 € hors taxe pour la relecture, le dépôt du règlement et l’établissement du procès-verbal. Le tarif d’un tirage au sort varie de 150 à 300 € hors taxe. Ces montants varient d’une étude à l’autre, car les honoraires sont libres. 

En matière de jeu-concours pour faire gagner un livre autoédité, il n’est pas forcément utile de se ruiner en déposant le règlement chez un commissaire de justice. Mais cela peut être intéressant lorsque vous faites gagner des lots d’une valeur importante.

Les règles et conditions générales d’utilisation des réseaux sociaux

Si vous organisez votre jeu-concours sur les réseaux sociaux, aux règles légales viennent s’ajouter les conditions d’utilisation de ces réseaux sociaux. Chaque réseau social a ses propres règles en matière d’organisation de jeu-concours. 

Il vous appartient de vérifier vous-même les conditions applicables au réseau social sur lequel vous organisez votre jeu-concours. 

Afin de vous aider, vous trouverez ci-dessous quelques exemples de règles de certains réseaux sociaux. Noter toutefois que ces conditions peuvent évoluer (ce sont les règles applicables lors de la rédaction de l’article en mai 2023). 

Instagram

Pour Instagram, le réseau social précise que vous êtes seul et unique responsable du jeu-concours que vous organisez, que ce soit en termes de légalité, en termes de marketing et de promotion. Vous devez donc définir vous-même les conditions de l’offre, des modalités de participation, etc. À ce titre, vos conditions doivent porter la mention selon laquelle le jeu-concours n’est pas généré ni sponsorisé par Instagram. En outre, les règles d’Instagram précisent également que vous ne devez pas pousser les utilisateurs à s’identifier sur une photo sur laquelle ils n’apparaissent pas. 

Twitter

Twitter, lui, indique qu’il faut demander aux utilisateurs de vous mentionner dans leur commentaire de participation. Twitter indique qu’il faut également décourager la publication répétée d’un même tweet ainsi que la création de multicomptes juste pour participer au concours. 

Tik Tok

Tik Tok reste plus silencieux sur l’organisation de jeu-concours. Les règles de Tik Tok indiquent simplement que la promotion de services de jeux d’argent est interdite. 

Facebook

Sur Facebook, il est interdit d’exiger des participants qu’ils partagent, republient ou identifient d’autres personnes. Là aussi, Meta (société propriétaire de Facebook), se dégage de toute responsabilité dans l’organisation du concours et il vous appartient d’inscrire que les participants reconnaissent que ce jeu-concours n’est pas géré par Facebook

YouTube

Enfin, sur YouTube, votre concours doit être gratuit, sans obligation d’achat. Si le concours consiste en la création d’une œuvre au sens du droit d’auteur, vous ne pouvez pas demander aux participants de vous céder leurs droits. Les règles de YouTube indiquent également que vous devez là aussi spécifier que YouTube n’est pas un sponsor du concours et qu’il ne saurait être tenu responsable de tout élément qui y serait lié.

Les opérations interdites en vertu de la loi sur le prix unique du livre

Enfin, bien que cela ne soit pas à proprement parler des « jeux-concours », il est important de garder en tête que le prix de vente d’un livre est encadré par la loi du 10 août 1981 sur le « prix unique du livre ». De cette loi découlent plusieurs restrictions et interdictions en matière de «vente à prime», c’est-à-dire l’achat d’un produit ou d’un service (par exemple, un livre) contre un cadeau ou un autre produit à prix réduit.

Au sens de la loi de 1981 et des décisions de justice, le cadeau de la « vente à prime » ne peut pas être un livre ou consister en un bon d’achat à la suite de l’achat d’un livre. Par ailleurs, l’opération commerciale doit pouvoir s’effectuer sur tous vos canaux de vente.


Elvire Bochaton est juriste en Droit de la Propriété Intellectuelle et plus particulièrement en droit de l’édition et de l’autoédition. Elle a travaillé avec plusieurs maisons d’édition. 
Littéraire dans l’âme, sa pratique du droit se complète à une sensibilité artistique la conduisant à prendre en considération toutes les étapes de création d’une œuvre. Dans cet objectif, elle a conçu le Guide de Survie Juridique pour Écrire et Publier son Livre. Celui-ci est aussi bien à destination des auteurs que des éditeurs et a pour rôle de réunir les 100 questions juridiques principales fréquemment posées durant le processus d’écriture, la publication et la post-publication d’un livre. 
Si d’ailleurs vous souhaitez approfondir certaines questions ou thématiques abordées au sein des articles juridiques présents sur Kobo Writing Life, le Guide de Survie Juridique pour Écrire et Publier son Livre est fait pour vous ! 
En plus de ses activités de juriste et d’autrice, Elvire Bochaton est également rédactrice juridique, conférencière et formatrice pour délivrer de l’information juridique aux auteurs et les accompagner durant tout leur processus créatif et de publication. 
Dans la pratique de son métier, rendre le droit accessible pour tout public est l’une de ses priorités. 
Selon elle, le droit est un moyen pour concrétiser ses projets et ne doit plus être perçu comme une contrainte.
Son site internet : www.elvire-bochaton.com

Son compte Instagram : https://www.instagram.com/livre_legalite/

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.