En tant que lecteurs, nous connaissons tous l’importance du titre d’un roman. C’est un élément qui influence directement l’achat, tout autant que la couverture ou le résumé. Un titre, les mots choisis, ce qu’ils révèlent de l’univers peuvent déjà intriguer le lecteur, lui faire entrevoir l’histoire qui se cache derrière les pages, l’aider à deviner si la lecture pourrait lui convenir ou non. Un titre, c’est une promesse.
Pour ma part, si celui-ci contient les mots « livres », « manuscrit », « écriture », « bibliothèque » ou « cupcakes », ou n’importe quel autre mot qui évoque la gourmandise, je vais vouloir en savoir davantage ! Chaque lecteur a son déclic, son déclencheur, ses mots-clés préférés.
En tant qu’auteur, on sait donc pertinemment à quel point un titre est décisif pour l’avenir de notre roman. Cela se révèle parfois intimidant et même bloquant ! Quand est venu le moment de le choisir, on se pose un millier de questions. Parfois, les mots s’assemblent tout seuls, et, parfois, ils jouent avec nos nerfs. Baptiser son histoire peut tenir du casse-tête tant on a conscience de l’importance de ces quelques mots. Comment choisir son titre de roman ? Je vous livre quelques anecdotes personnelles et quelques astuces pour réussir cet exercice.

Quand choisir son titre ?
Pour ma part, je suis incapable de commencer la rédaction de mon manuscrit s’il n’a pas un titre qui me motive. Le titre représente l’identité de mon histoire et si je ne l’ai pas, cela signifie que je n’ai pas encore saisi sa couleur, sa tonalité, sa personnalité. C’est un point de vue très personnel et je ne sais pas si d’autres auteurs ressentent la même chose. Certains travaillent sur des documents qu’ils nomment « projet 12345 » ou « manuscrit sans titre ». Je suis incapable de fonctionner de cette manière-là, j’ai besoin de trouver les mots justes et adéquats pour comprendre l’essence de mon roman. Il arrive ainsi parfois que le titre évolue au fil de votre écriture pour suivre la tonalité de votre roman.
Une histoire de mots-clés
Pour trouver un titre, ressentez votre histoire, son ton, son cœur. De mon côté, je note des mots que j’aime et j’en dresse des listes tout en réfléchissant à l’univers de mon futur roman. J’ai besoin que chaque choix de mot ou de son soit porteur de sens et colle avec la symbolique du texte.
Vous pouvez également partir de vos thématiques : de quoi parle votre histoire ? Comme un entonnoir, vous allez ensuite dégager des mots puis réaliser un tri. Quels sont les mots qui vous touchent et qui vous parlent le plus ? Comme un bon vin, testez des assemblages, repérez ceux qui résonnent en vous.
Quand je suis dans cette phase d’essai, je sens assez vite quand il y a un accroc, quand quelque chose me dérange et tant que je ne ressens pas de fluidité, je poursuis ma quête du titre adéquat, celui qui collera à la peau de mon manuscrit.

Le titre oriente vos lecteurs
Dans votre titre, vous pouvez clairement apporter des éclairages sur l’histoire. Mon premier roman s’appelait Mon ex me colle à la peau, cela laisse clairement deviner ce que l’on va trouver dans le livre. Marc Levy a titré son premier livre publié Et si c’était vrai…, ce qui drape l’histoire de mystère et nous donne envie de savoir quel fait de l’intrigue va nous faire douter de la réalité. Quand Maxime Chattam intitule ses romans policiers La Patience du Diable ou L’Âme du mal, on se sent déjà oppressé, la promesse est plutôt claire. Dans les romances érotiques, un « Je te veux » ou « Sept ans de désir » ont déjà prouvé leur efficacité.
Pour Des cookies pour Noël, ma dernière romande de Noël, je me trouvais dans un genre très codifié. J’ai fait des recherches sur les titres de romances déjà publiées, j’y ai trouvé des mots comme : neige, flocon, sapin, chalet, chocolat, Noël (évidemment), hiver, gui, lutins… Comme je prévoyais un concours de fabrication de cookies, le titre a été assez simple à définir.
Ainsi, pour vous aider, vous pouvez vous inspirer d’éléments de votre histoire comme un personnage, d’un lieu, d’une atmosphère, d’une émotion, d’une aventure, une phrase de votre texte… Une fois ce travail effectué, vous pouvez demander l’avis de votre communauté sur les réseaux sociaux. À quoi fait penser votre titre ? Quelles associations de mots donnent le plus envie de découvrir l’histoire ?
Précaution juridique
Dernière étape et pas des moindres : vérifiez, a minima sur Internet, que votre titre n’a pas déjà été utilisé par un autre romancier avant vous. Consultez également l’article de Elvire Bochaton sur le sujet. Si c’est le cas, vous avez le droit de hurler de désespoir (en effet, vous avez déjà mis du temps à le trouver) et, une fois cette étape franchie, vous remettez l’ouvrage sur le tapis et vous repartez pour un tour de manège.
Cas pratique : 3 titres pour 1 roman
Quand j’ai commencé à écrire l’histoire de Mélissa et de Diane, roman qui s’est finalement appelé L’amour à pleines dents et qui a remporté le prix de la Meilleure romance en 2017, je me retrouvais encore beaucoup dans l’esprit de la chick-lit et j’avais donc choisi d’appeler ce roman Cupcakes & love story à Montréal. Pour moi, cela collait avec les ingrédients présents dans le manuscrit : des gâteaux et des histoires d’amour. Et, vous l’aurez deviné, l’intrigue se déroulait au Québec. Je donnais ainsi un avant-goût de cette intrigue en évoquant la pâtisserie et j’y apportais en plus un petit côté international et malgré tout très ouvert sur l’Amérique anglophone, ce qui me semblait cohérent avec Montréal et ses habitants.
Au fur et à mesure de la rédaction, je me suis rendu compte à quel point le parcours de vie de ces deux femmes et leur rencontre me permettaient d’aborder des thématiques que je trouvais intimement liées à des sujets plus profonds, à nos rêves, à nos douleurs, aux blessures du passé, à l’équilibre de nos vies et au bonheur que l’on cherche. Leur relation amicale semblait prendre le pas sur leurs histoires d’amour respectives, et j’avais donc envie de changer la tonalité de mon titre pour quelque chose de plus doux et de plus poétique. J’en suis donc venue à l’appeler Le goût des rêves est éternel. Pourquoi ? Au Québec, on utilise souvent l’expression « avoir le goût de… » pour signifier que l’on a un souhait ou que l’on a envie de quelque chose. Le goût faisait également référence au magasin de cupcakes que Diane tenait dans le Vieux-Montréal. Le roman évoquait aussi le rêve de Mélissa de devenir chanteuse et compositrice. J’aimais particulièrement ce titre, tous ces éléments avaient été mûrement réfléchis et revêtaient donc un sens bien précis pour moi.
Comme vous avez pu le lire, mon éditeur a cependant choisi de modifier mon titre (cela arrive dans l’édition), souhaitant lui donner une touche plus romantique en remettant l’amour au centre : L’amour à pleines dents. J’ai compris par la suite que cela collait davantage à l’image et à la ligne éditoriale de l’éditeur, même si c’est toujours un moment compliqué pour un auteur. L’avenir a confirmé que la stratégie était la bonne puisque le roman a rencontré son public et a été un joli succès.
Quelques mots pour conclure
À mes débuts, j’ai lu beaucoup d’articles pour trouver des conseils sur les titres de roman. Beaucoup d’entre eux prônent d’aller au plus simple, martelant que votre titre doit être clair, précis et pas trop long… j’ai envie de vous dire d’écouter votre instinct. Il n’y a pas de règles absolues. Parfois, il ne faut pas suivre tous les codes pour être remarqués ! Repensez au titre du roman de Romain Puértolas qui a fait un carton : L’extraordinaire voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea, à celui de Katherine Pancol Les écureuils de Central Park sont tristes le lundi ou encore à Ta deuxième vie commence quand tu comprends que tu n’en as qu’une de Raphaëlle Giordano. Ils ont tous été des best-sellers.
Bon travail ! Amusez-vous avec les mots, construisez des combinaisons inédites… Je suis certaine que vous allez trouver votre titre idéal !
Caractéristiques de Cali Keys : adore les palmiers, les Bisounours, les Piña Colada et les fraises Tagada.
Lieu de vie : Suisse après un passage en Californie et des études à Paris.
Déteste se mouiller les chaussettes dans la salle de bains, terminer une boîte de biscuits (y en a plus après) changer le rouleau de papier toilette et arroser les plantes.
Côté édition, elle a publié son premier roman Mon Ex me colle à la peau en 2013 avant de travailler avec des éditeurs comme Milady, Prisma, Charleston, AdA et Hauteville. Son roman, L’amour à pleines dents ! a reçu le prix Diva de la meilleure romance 2017.
Ses genres de prédilection? La romance, la new romance, le new adult, le feel-good et la comédie romantique.
Elle a publié onze romans (et ne compte pas s’arrêter, elle est trop accro) et aime partager sa passion en animant des ateliers d’écriture. Depuis plus de 8 ans, elle soutient et accompagne des primo-romanciers dans leur désir d’écrire.
Elle a également animé la masterclass Romance pour Kobo et participe régulièrement à des tables rondes et des conférences sur l’art romanesque.