Si dans le dernier article, nous avons vu la partie méthodologie, ici, nous allons faire le tour des erreurs les plus courantes. Le seul fait d’en avoir connaissance vous permettra, lors de vos relectures, d’être alerté : même si vous ne vous souvenez pas des détails, vous saurez que tel mot ou telle situation peut être problématique, et cela vous permettra de retourner chercher les informations à ce moment-là.
Retrouvez rapidement les 5 types de fautes :
- La conjugaison
- Les homophones
- Les solécismes, barbarismes, impropriétés
- Les problèmes de construction
- La ponctuation et la typographie
1. La conjugaison
La conjugaison est une partie très technique, source de nombreuses difficultés. Entre le choix des temps, la concordance et les terminaisons, les possibilités d’arrachages de cheveux sont nombreuses, je vous l’accorde.
Je m’excuse par avance des mauvais souvenirs d’école qui pourraient remonter, promis j’essaye de faire simple.

Le système des temps : narration au passé ou au présent ?
Le système des temps correspond au temps de la narration que vous avez choisi : passé ou présent. De ce choix découlent les temps utilisés dans votre roman.
Dans une narration au passé, on utilise le passé simple et l’imparfait pour le fil temporel principal, le plus-que-parfait et l’imparfait pour ce qui s’est passé avant, et le conditionnel présent pour ce qui se passera ensuite.
Dans une narration au présent, c’est plus facile, car ce sont les temps que l’on emploie au quotidien : présent pour le fil temporel principal, imparfait et passé composé pour ce qui s’est passé avant, futur simple pour ce qui se passera après.
La concordance des temps
Mais il y a aussi la concordance des temps au sein de la phrase qui pose souvent souci. Dans une phrase complexe (c’est-à-dire qu’il y a deux verbes ou plus), on doit déterminer deux choses :
- Quelle est la proposition principale, et quelle est la proposition coordonnée ou subordonnée.
- Quel est l’ordre chronologique entre les deux verbes. L’action indiquée dans la proposition coordonnée ou subordonnée se passe-t-elle avant, simultanément ou après l’action de la proposition principale ?
« Arthur sait bien que Tom a du travail. »
Deux sujets, deux verbes, une conjonction.
Ici, la phrase principale (Arthur sait bien) est au présent, et l’action de la proposition subordonnée (qu’on reconnaît grâce à la conjonction de subordination que) se passe en même temps, donc on utilise également le présent.
Les combinaisons possibles sont trop nombreuses pour être détaillées dans cet article, mais vous pouvez télécharger le guide PDF ci-dessous.
Le subjonctif
Avec certaines locutions, le subjonctif est obligatoire, avec d’autres, interdit. Certaines locutions admettent les deux. L’astuce, c’est de remplacer le verbe par faire, dont le subjonctif s’entend bien à l’oreille.
Attention cependant aux erreurs si répandues qu’elles ne nous choquent pas à l’oreille : la locution après que, par exemple, demande l’indicatif. On écrit « après que je suis » et non « après que je sois ».
Bien que, lui, demande le subjonctif ; c’est une faute que je trouve très fréquemment. On dit « bien que je sois » et non « bien que je suis ».
2. Les homophones
L’oreille est souvent d’une grande aide lors de l’écriture et des corrections, mais là, elle ne peut rien pour nous, c’est pour cela que les homophones sont vraiment dans le top des fautes les plus répandues.
De homos (semblable) et phonê (son), ce sont les mots que l’on prononce pareil, mais qui s’écrivent différemment. Petit tour d’horizon de ceux que je rencontre le plus.
Les homophones dans la conjugaison (encore elle !)
- J’irai ou j’irais ?
La confusion du futur (irai) et du conditionnel (irais) à la première personne pose vraiment souci à beaucoup d’entre nous. (Oui, je m’inclus !) En dehors de l’orthographe en elle-même, le problème est même parfois de savoir quel temps est adapté.
Le truc qui m’aide à faire la différence facilement, c’est de changer de personne : nous irons, ou nous irions ?
- Je jetai ou je jetais ?
La confusion du passé simple (jetai) et de l’imparfait (jetais) à la première personne est elle aussi fréquente. De la même façon, dans certains cas, les deux temps pourraient convenir. On passe à la troisième personne : il jeta ou il jetait ?
Pour rappel, dans une narration au passé, le passé simple a pour valeur l’action, définie dans le temps, alors que l’imparfait a une valeur de description, d’actions longues, répétitives ou non définies dans le temps. Quand les deux conviennent, à vous de choisir le sens et le rythme que vous voulez donner à la phrase : le passé simple est plus dynamique.
- Il serre ou il sert ?
Les verbes serrer, du premier groupe, et servir, du troisième groupe, sont souvent confondus lorsqu’ils sont conjugués. Dans « il serre », on retrouve le e de l’infinitif en -er.
Les homophones que l’on voit souvent
- Et/eh : on écrit « Eh bien ! » et non « Et bien ! ».
- Les mots sous forme verbale/nominale : par exemple fabriquant/fabricant, convainquant/convaincant, fatiguant/fatigant… Pour les distinguer, il faut se dire que le verbe indique l’action, et que le nom peut se mettre au féminin, par exemple : « Fabriquant des produits illicites, la fabricante a été mise sous les barreaux. »
- Les substantifs des verbes acquérir et acquitter : acquis/acquit. (On écrit par acquit de conscience, car on a acquitté sa conscience.)
- Censé et sensé : censé est un synonyme de « supposé », sensé veut dire « qui a du sens ».
- Près et prêt : on dit près de (par opposition à loin de), ou prêt à (on peut le mettre au féminin), par exemple : « Prête à tout, elle était près de découvrir la vérité. »
- Résonner/raisonner : un son résonne, lorsqu’on raisonne, c’est que l’on fait preuve de raison.
3. Les solécismes, barbarismes, impropriétés
Les solécismes
Les solécismes, ce sont des phrases qui ne respectent pas les règles de grammaire : les mots sont correctement écrits, mais mal utilisés.
Exemples : on dit « se rappeler quelque chose » et non « de quelque chose » ; on dit « pallier quelque chose » et non « à quelque chose ».
Les barbarismes
Un barbarisme, c’est un mot mal écrit.
Exemple : on écrit un « dilemme », et non un « dilemne » (par confusion avec indemne) ; on écrit « s’ensuivre », et non « s’en suivre » en deux mots.
Les impropriétés
L’impropriété, c’est un mot utilisé à la place d’un autre.
Exemple : on écrit une « tête d’oreiller » à la place d’une « taie d’oreiller ».
Dans les impropriétés, on retrouve aussi les paronymes : des mots à consonances très proches, mais qui n’ont pas le même sens.
Dans les paronymes les plus fréquents, on a arborer (porter fièrement) et abhorrer (détester), dénoter (être le signe de) et détonner (surprendre, sortir du ton). Lui-même homophone de détoner (exploser).

4. Les problèmes de construction
Les ruptures de syntaxe
Ce sont des fautes très très répandues (j’en trouve dans quasiment tous les manuscrits que je corrige), et difficilement décelables. Même moi, il m’arrive d’en faire, parce que notre cerveau réfléchit trop vite et prend des raccourcis. Mais ce qui est logique pour nous ne l’est pas pour le lecteur, d’où l’importance de respecter la syntaxe pour que le message passe bien.
La rupture de syntaxe – ou anacoluthe, pour les poètes – est une rupture du lien logique entre le sujet, le verbe et le complément.
« Malade, mon patron m’a autorisée à rester à la maison. »
Mis en apposition, le complément « malade » concerne normalement le sujet de la phrase. Ici, c’est donc le patron qui est malade. Sauf qu’a priori, c’est plutôt moi qui suis malade. La seule possibilité est la reformulation : « Comme je suis malade, mon patron… »
Les ambiguïtés grammaticales
Une phrase est ambiguë si elle peut être lue et interprétée de plusieurs manières. Vous pouvez en jouer bien sûr, mais ça doit être fait en toute conscience, pour servir un but. Toutes les autres ambiguïtés doivent être levées, soit par une reformulation, soit par un contexte clair, pour ne pas perturber la fluidité.
Attention notamment à l’utilisation des pronoms, qui peuvent créer des incompréhensions, des incohérences, voire des contresens.
Implicitement, le pronom reprend le dernier nom cité. Si vous écrivez « après avoir épluché les patates avec les enfants, rincez-les à l’eau froide », grammaticalement parlant, ce sont les enfants que vous avez rincés à l’eau froide. Ce qui est très drôle, donc encore une fois, si c’est l’effet voulu, c’est parfait, mais si vous êtes dans une scène dramatique, ça coupe un peu l’intensité !
Attention aussi aux pronoms « il » quand il y a des interactions entre deux hommes, ou « elle » entre deux femmes : « Marie et Julie sont allées se promener, elle lui a raconté ses vacances. » Qui parle à qui ?

5. La ponctuation et la typographie
La virgule
Elle mériterait tout un roman à elle toute seule, et elle est d’ailleurs à l’honneur dans le Traité de la ponctuation française de Jacques Drillon. Une bible de la ponctuation que je vous recommande si vous êtes intéressé par le sujet.
Le principe de base de la virgule, c’est qu’elle ne doit pas séparer le verbe de son sujet ni de son complément. C’est une norme qui n’a pas toujours eu cours, mais qui est en vigueur de nos jours.
« C’était l’année de ses vingt ans et ma sœur, était allée vivre à l’étranger. »
La virgule après sœur est proscrite.
« C’était l’année de ses vingt ans et ma sœur, plus âgée que moi, était allée vivre à l’étranger. »
La coupure entre le sujet et le verbe est ici autorisée, car « plus âgée que moi » est une incise, placée entre deux virgules qui s’équilibrent.
Abréviations
Monsieur et madame répondent à certaines normes. Les guides de typographie ne sont pas tout à fait d’accord, alors voilà la conduite que je tiens habituellement lors de la correction des romans :
Monsieur s’abrège M. et non Mr (qui est l’abréviation de mister), et madame s’abrège Mme ou Mme. Mais on ne les abrège pas partout.
Dans les dialogues, quand un personnage s’adresse à un autre, on écrit au long : « Comment allez-vous, madame Machin ? »
Dans la narration, on abrège s’il y a un nom après, sinon on l’écrit au long.
« La veille, j’avais croisé un monsieur bizarre, et le lendemain, j’ai croisé M. Truc. »
Italique et guillemets
Nombreuses sont les situations où l’on hésite entre l’italique et les guillemets. Voici les cas les plus courants dans les manuscrits :
- Citation, paroles rapportées : guillemets.
- Dialogues internes : italique.
- Titres d’œuvres (chansons, films) : italique.
- Mot mis en relief : ça dépend ! Si c’est pour souligner le caractère officiel, objectif, alors l’italique. Dans le cas d’une acception particulière, subjective, plutôt les guillemets.
Vous êtes prêt pour votre relecture ? Pensez également à consulter l’article « 5 étapes pour relire et corriger son roman » pour vous organiser au mieux !
Emmanuelle Billant a décidé de se professionnaliser pour vivre de sa passion. Après le passage du certificat Voltaire en 2020, elle complète avec une formation de relecteur-correcteur auprès du CEC (Centre d’écriture et de communication) de mars 2021 à février 2022. Découvrez son parcours et ses prestations sur son site : plume-en-main.com