À l’occasion de la sortie de son nouveau roman, Le Miroir brisé, en exclusivité sur Kobo, Théo Lemattre a accepté de répondre à notre questionnaire Kobo Writing Life. Auteur d’une quarantaine de romans, Théo Lemattre a commencé l’écriture en 2015 par le biais de l’autoédition, avant d’être repéré par une maison d’édition traditionnelle en 2018 avec 5 pas vers le bonheur. Il vit de l’écriture depuis fin 2016. Il collabore avec une société de production sur une application interactive pour incarner l’héroïne de sa propre romance et a cofondé une agence de ghostwriting.


8 questions à l’écrivain
Comment définiriez-vous votre écriture en un lieu, un animal, une couleur ?
C’est une première question difficile, parce qu’elle fait davantage appel au ressenti qu’au mental, mais je crois que si mon écriture était un lieu, ce serait chez moi. Et ma maison se trouve partout où est ma compagne. Alors, je dirais qu’en fin de compte, mon écriture, c’est aussi elle. Si elle devait être un animal, elle serait un chat, aussi volatil que têtu. Enfin, si je devais lui donner une couleur, je lui attribuerais la couleur jaune. Même si j’ai longtemps délaissé les récits noirs pour des histoires plus colorées, qui me ressemblaient davantage, le gris est revenu au galop avec son lot d’idées sombres, depuis quelques temps. Mais je crois qu’elle est toujours jaune. Je garde espoir !
Votre écriture a-t-elle évolué au cours de la rédaction de cet ouvrage ?
Ce récit a été particulièrement éprouvant. Non pas parce qu’il est plus long que les autres, mais parce que le véritable défi a été de me mettre à nu. Car, pour une fois, la fiction rejoint parfois la réalité et jamais une histoire n’a été aussi personnelle. Je ne parle pas d’une autobiographie, bien sûr, mais de situations qui me sont très familières et qui, aussi douloureuses soient-elles, ont laissé une empreinte au plus profond de moi. C’est pour cela que, je crois, ce récit m’a permis d’évoluer personnellement et sans doute de faire évoluer ma plume, au passage.
Racontez-nous la première phrase.
« Aujourd’hui, c’est mon anniversaire. » Aussi banale qu’elle puisse être, cette phrase a une grande importance pour moi et c’est aussi la raison pour laquelle ce livre est si personnel. Depuis que je suis écrivain à plein temps, je trouve une formidable symbolique dans l’idée qu’on se fait de l’anniversaire, du temps qui passe, et des cadeaux que l’on reçoit. Exercer ce métier, avoir cette chance, me donne le sentiment que chaque jour est un peu mon anniversaire. Et que ce sont les lecteurs qui, en me faisant confiance à travers mes histoires, m’offrent le plus beau des cadeaux. Souvent, on me remercie d’écrire. En vérité, c’est moi qui vous remercie de me lire. Il y a de nombreux écrivains anonymes auxquels justice n’est jamais rendue puisque leurs textes ne sont pas lus. Je me rends compte de la chance que j’ai et je la savoure tous les jours !
Est-on seul quand on écrit ?
Il paraît que oui. Dans mon cas, cela ne se confirme pas. En fait, je ne peux pas décemment occulter toutes les personnes qui m’entourent dans les processus de rédaction du texte. Je ne peux pas ne pas mentionner mes amis, mes bêtas-lectrices de choc, ma compagne, toutes ces personnes qui sont autour de moi au quotidien, qui m’aident et m’encouragent. Avant, je croyais que l’écriture était une affaire personnelle. Désormais, je sais qu’il s’agit davantage d’un engouement collectif.
Quand savez-vous que votre roman est fini ?
Il est fini quand je le décide et pas avant. Le fait est que… j’ai abandonné le fantasme de la perfection. Tout ce que je veux, c’est raconter de bonnes histoires. Elles ne sont sans doute pas parfaites, mais je donne le meilleur de moi-même. Si je devais attendre d’être certain que tout soit parfait, le roman ne serait jamais fini et je crois que c’est le cas pour de nombreux collègues de plume autour de moi également.
Avez-vous peur des critiques ?
Pas vraiment. Quand on a compris que l’on ne peut pas faire l’unanimité (dans aucun domaine), on commence à avoir les idées plus claires sur ce sujet et à prendre un peu de recul aussi. Les critiques ne me font pas peur et je les lis bien volontiers parce que je reste à l’écoute. Je souhaite progresser en permanence pour proposer le meilleur de moi-même en toutes circonstances. Elles sont toujours les bienvenues ! Je me souviens de la pire critique que j’ai reçue, qui parlait de mon style littéraire, beaucoup trop châtié, à l’époque. Et la personne avait pointé du doigt le ridicule de certains usages. Je l’avais assez mal pris, dans un premier temps, mais j’ai pris du recul et je me suis rendu compte que cette critique était fondée. Alors, j’ai assimilé son contenu et j’en ai fait une force pour progresser ! Le meilleur retour que j’ai reçu, je crois qu’il s’agit de celui d’une lectrice qui m’a dit que mon livre lui avait permis de faire le deuil de son grand-père et que cela l’avait beaucoup aidé. Je me suis senti utile, tout à coup. Je n’étais plus une simple source de divertissement, j’étais devenu, l’espace d’un temps de lecture, un allié, une béquille pour cette jeune femme, qui en avait besoin. Et c’est ça, ma plus belle récompense !
Lisez-vous d’autres auteurs autoédités ?
Pour moi, l’auteure autoéditée la plus barrée, la plus ambitieuse et qui mérite le plus de reconnaissance est sans aucun doute Gina Dimitri. Les livres de Gina sont toujours des pépites de folie et d’ingéniosité.
Votre meilleure astuce ou conseil à partager ?
Le meilleur conseil que je puisse partager concernant l’écriture, c’est d’écrire. Il n’y a rien d’autre à faire, malheureusement. C’est en écrivant qu’on apprend à se connaître et à s’organiser dans tout ce joyeux bazar. Et même si la route est longue, même si les premiers jets sont mauvais, dites-vous bien que ça ne pourra jamais être aussi mauvais que mes débuts ! Blague à part, l’écriture est une formidable thérapie. Lancez-vous sans la moindre pression et voyez où ça vous mène ! Vous pouvez commencer à 15 ans dans votre chambre et finir, quelques années plus tard, par en faire votre métier. Qui sait ?
Complétez cette phrase :
Le monde serait mieux avec plus de chocolat et triste sans pulls moches de Noël.

7 questions à l’autoéditeur
Comment en êtes-vous venu à l’autoédition ?
Pas de langue de bois, rien que la vérité ! Personne ne voulait me publier, voilà tout. Et, avec du recul, je comprends pourquoi. Les textes étaient mauvais. Objectivement, ils étaient bourrés de sincérité et d’amour de l’écriture, mais ils manquaient de technique et de finesse. J’ai donc choisi de m’exposer à l’épreuve du feu sans y avoir été préparé, en tombant sur une interview de Jacques et Jacqueline Vandroux. Ils parlaient de leur expérience dans l’autoédition. Ça m’a donné envie d’essayer, moi aussi. J’aime mieux éviter de parler d’un choix, ou d’une vocation, en ce qui concerne l’autoédition, parce que ce n’était pas le cas. Aujourd’hui, je dirais que les choses ont changé et que l’autoédition s’est largement professionnalisée, ce qui donne des ouvrages de qualité. Désormais, je trouve cela cohérent de choisir cette voie quand on voit que cette tendance a gagné de nombreux autres domaines comme la musique, le cinéma, etc.
Avez-vous une routine d’écriture idéale ?
Me lever le plus tôt possible, aller au café au coin de ma rue, commander un double espresso et me lancer !
Faites-vous appel à des bêta-lecteurs ?
Toujours ! Les bêtas-lecteurs sont une partie intégrante de mon quotidien. Je leur envoie les chapitres un par un. Pour moi, c’est indispensable.
Comment choisissez-vous le prix de vos romans ?
Au risque de décevoir et de démystifier certaines choses, je m’aligne uniquement sur les prix du marché. Je ne suis pas innovant dans ce domaine. Les prix, dans l’autoédition, se situaient autour de 2,99 € quand j’ai commencé. Aujourd’hui, je crois que ça n’a pas tant changé et il me semble que les livres numériques doivent rester accessibles. La lecture est un plaisir qui doit être permis à tous.
Comment avez-vous choisi votre graphiste de couverture ?
J’ai la chance immense d’avoir une compagne qui exerce dans ce domaine. C’est elle qui créé toutes les couvertures de mes romans et qui, la plupart du temps, m’aide aussi pour la mise en page et la maquette. En bref, je m’occupe de la partie amusante en écrivant et elle, la pauvre, se coltine tout le reste !
Quel serait votre astuce pour réussir dans l’autoédition ?
De rester proche de ses lecteurs. De ne pas hésiter à leur demander conseil. Bref, d’être un humain avec ses forces et ses faiblesses et, surtout, de ne pas jouer un rôle. Il faut rester soi-même et avoir quand même une bonne dose d’énergie pour être capable de gérer toutes les casquettes à la fois.

3 questions fictives à Lisa, personnage principal du roman Le Miroir brisé
Dans Le Miroir brisé, Théo Lemattre interroge la maternité, l’amitié, la maltraitance et le pardon. Nous avons posé quelques questions à Lisa, l’un des personnages principaux de ce roman.
Comment êtes-vous née ?
Je m’appelle Lisa et l’inspiration pour mon personnage a surgi en Pologne, durant une expatriation de mon créateur. On ne dirait pas comme ça, mais il m’apprécie beaucoup. J’ai captivé son attention durant pratiquement trois ans, puisque mon histoire a été rédigée en 2020. Mais il n’a jamais osé la faire lire ou la publier tout de suite. Cette parution est un grand pas en avant, je crois. J’ai envie que mon histoire soit racontée.
Quel est votre cheminement dans ce roman ?
Je traverse le temps et des moments clés de ma vie pour me découvrir, en découvrir plus sur ma mère, mais aussi sur mon passé. Je recompose ma mosaïque familiale sans jamais me laisser abattre.
Révélez-nous un secret sur votre créateur ?
Il est terrifié à l’idée de révéler cette histoire, parce qu’elle n’a jamais autant résonné au fond de son cœur qu’aujourd’hui.
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