Vous avez terminé le premier jet de votre roman, vous avez effectué une danse de la joie dans votre salon (et vous avez bien raison car il s’agit d’une première victoire importante), mais vous restez cependant conscient que le travail sur votre texte n’est pas fini…
Il est désormais temps de faire lire votre manuscrit à vos bêta-lecteurs, autrement dit, à un groupe de « testeurs » qui pourra vous aider à améliorer votre style, vos personnages et la cohérence de votre histoire. Vous avez écrit votre intrigue de votre point de vue, mais est-ce que celle-ci est compréhensible ? Le bêta-lecteur va vous apporter une réponse essentielle : votre histoire est-elle claire pour quelqu’un qui n’est pas dans les méandres de votre cerveau ?
Mise en garde : le bêta-lecteur n’est pas un correcteur
Premier point à éclaircir : le rôle de ce lecteur particulier ! Son but n’est en effet pas de traquer les fautes d’orthographe, de syntaxe, de typographie ou de grammaire. Pour ce faire, on mandate un correcteur professionnel dont c’est le travail.
Le but d’un bêta-lecteur est de vous fournir un retour sur votre texte. Idéalement, cette personne possède les qualités suivantes : elle est dotée d’un esprit critique et est capable de pointer les incohérences de votre intrigue ou d’un passage en particulier, elle se montre objective et bienveillante, elle devrait également connaître et apprécier le genre de votre manuscrit. À quoi bon donner à lire une comédie ou un thriller à quelqu’un qui ne peut pas les voir en peinture ?
S’entourer des bonnes personnes
Près du cœur, loin du texte
Pour bénéficier de remarques sincères et de critiques constructives, il faudra bien choisir votre cercle de bêta-lecteurs. Oubliez les gens trop proches de vous, ils auront tendance à vous dire que votre roman est génial. Ma mère adore tout ce que j’écris. Certes, ça fait toujours plaisir à entendre mais à cette étape, vous avez besoin de clés pour améliorer votre manuscrit et cela est uniquement possible si vous obtenez des remarques pertinentes. En revanche, ma mère m’aide sur l’orthographe (oui, il m’arrive de faire des fautes…), ce qui est toujours utile mais ce qui ne me permet pas d’améliorer mon intrigue ou mes personnages.
Les écrivains et les grands lecteurs
L’idéal est de pouvoir choisir des connaissances qui écrivent aussi ou qui sont elles-mêmes de grands lecteurs. Travailler avec d’autres écrivains est précieux car ceux-ci ont souvent un œil affuté pour repérer les éventuelles problématiques de structure, de psychologie des personnages ou les failles de vos arcs narratifs. Les lecteurs aguerris connaissent les codes de leurs genres de prédilection et pourront vous apporter un regard sur l’originalité ou la fluidité du texte, ainsi que certains détails.
Pour ma part, je collabore avec de bons amis romanciers et avec de grandes lectrices de romance. Leurs retours sont précieux et me permettent d’apporter plus de finesse à mes histoires et de clarifier mes propos. J’aime leur faire parvenir mes chapitres au fur et à mesure de l’écriture car cela me permet de rester motivée. Me dire que mes bêta-lecteurs attendent mon texte me pousse à garder un rythme d’écriture régulier. J’imagine que certains auteurs préfèreront terminer sans pression leur premier jet et le reprendre en une fois avant de le livrer au jugement des autres. Faites comme vous le souhaitez ou testez les deux approches puis choisissez celle qui vous convient le mieux !
Une fiche de lecture pour guider les lecteurs moins expérimentés
S’il s’agit de votre premier roman, vous ne connaissez peut-être pas encore d’auteurs ou de lecteurs aguerris. Ce que j’aime bien proposer à mes bêta-lecteurs moins expérimentés ? Une fiche de lecture avec des points clés à analyser. Cet outil permet de les rendre attentifs à des éléments particuliers comme le style (ils peuvent pointer des descriptions interminables ou des dialogues abscons), la fluidité, la psychologie des personnages (est-ce que leurs réactions sont cohérentes par rapport à leur personnalité ? est-ce que le gentil est trop fade ou le méchant trop cliché ?), les points forts du roman et les points d’amélioration. Je leur demande également de sélectionner le suivi des modifications sur le fichier Word du texte afin qu’ils puissent insérer leurs remarquent au fur et à mesure de leur lecture.
Pour vous aider à rester motivé, vous pouvez aussi leur demander de noter les passages qu’ils ont appréciés et de mettre des cœurs dans la marge. Sourire garanti !
Faites une pause avant de vous lancer dans votre propre bêta-lecture
Si je peux vous prodiguer un conseil, c’est celui de laisser reposer votre texte quelques semaines avant d’entamer une première relecture personnelle. Avec cet œil neuf, vous allez déjà pouvoir améliorer votre roman et dépister les erreurs les plus grossières (votre héroïne portait un pantalon noir et elle termine la scène en jupe à fleurs, par exemple). Grâce à la pause effectuée, vous allez redécouvrir votre récit, un peu comme si quelqu’un d’autre l’avait écrit et vous aurez un regard distancié, un regard de lecteur sur votre production.
C’est un conseil qui peut s’avérer utile même si je ne l’applique pas parce que je suis trop impatiente. Cependant, je relis toujours mes chapitres pour effectuer une première correction avant de les transmettre à mes bêta-lecteurs (comme on le dit souvent « faites ce que je dis, pas ce que je fais »). Même si cette relecture est effectuée un peu « sur le vif », elle m’aide à lisser le texte et à corriger certaines maladresses de style.
Savoir recevoir les retours de vos bêta-lecteurs
La peur du jugement
La première fois que l’on partage ses écrits peut se révéler compliquée. Tout ce qu’on a rédigé, tout ce que l’on a construit avec amour, dévotion et temps nous tient à cœur. On s’apprête à mettre notre rêve (d’écriture, de publication) entre les mains d’autres personnes. On prend le risque de recevoir des critiques, d’être découragé, de se remettre en question alors que tout ce dont on a besoin à ce moment-là ce sont des encouragements !
Mais si justement vous visez une publication, c’est une étape essentielle pour progresser et améliorer votre roman. Ce n’est pas un exercice évident, je le conçois. Moi-même, je suis toujours stressée quand j’ouvre le fichier corrigé par mes bêta-lecteurs. Dites-vous que cette étape vous permet de gagner en qualité. Votre roman n’en sera que meilleur.
C’est votre roman avant tout
La crainte qu’ont partagée avec moi de jeunes auteurs durant cette phase est la suivante : ils avaient peur de perdre leur singularité, peur de perdre l’essence de leur texte à force de s’adapter aux multiples retours reçus. Je tente à chaque fois de les rassurer avec cette phrase : « C’est votre roman avant tout. » Cela signifie tout simplement que vous restez le maître à bord (votre pouvoir est énorme, c’est chouette, non ?) et que vous aurez le dernier mot. Si plusieurs bêta-lecteurs pointent le même problème, cela vaut la peine d’y prêter attention pour améliorer votre histoire, mais s’il s’agit d’une remarque personnelle, celle-ci est donc purement subjective et elle relève d’une vision unique.
Ne vous perdez pas en demandant un avis à dix personnes. Vous risquez de vous éparpiller et cela nécessitera un énorme travail pour lire tous ces retours (attention au burnout !). Trop d’informations tue l’information et vous risquez d’être submergés. Préservez-vous. Si vous pouvez obtenir un retour de trois ou quatre personnes, cela vous donnera déjà un avis plus clair quant aux points à améliorer.
Prendre soin de ses bêta-lecteurs et l’importance de la gratitude
Pour faciliter la lecture et pour les aider dans leur tâche, n’hésitez pas à leur transmettre votre manuscrit avec une mise en page agréable et aérée. Pour ce faire, vous pouvez choisir une police d’écriture standard et un interligne de 1,5 par exemple.
Et n’oubliez pas de vous montrer bienveillants avec vos bêta-lecteurs. Après tout, ce sont eux qui vous rendent un énorme service en relisant votre histoire. Lire un manuscrit de manière attentive et produire un retour détaillé représente un travail conséquent. N’oubliez pas de les remercier. Vous pouvez par exemple les mentionner dans les remerciements de votre livre, c’est une petite attention qui démontre votre gratitude à leur égard.
Se remettre au travail
Une fois les retours réunis, il est temps de se remettre au travail ! Vous pouvez parcourir les remarques et noter les points communs qui émergent parmi les critiques et les fiches de lecture. Pour les remarques subjectives, prenez le temps de les analyser et de voir si elles dépendent de la sensibilité de votre bêta-lecteur ou si vous pensez qu’une correction s’avère nécessaire.
Quelques mots pour conclure
Alors, êtes-vous prêts à relire votre manuscrit, trouver vos bêta-lecteurs et livrer votre œuvre à des yeux neufs et avides de plonger dans votre univers ? Courage ! Vous êtes bientôt au bout et vous aurez encore plus de plaisir à publier votre livre en ayant confiance en votre histoire. Parce qu’il s’agit aussi de cela : ce processus et les retours engrangés, le travail et la réécriture qu’ils génèrent, représentent des garants de la qualité de votre travail. Et si 2023 était la bonne année pour vous jeter à l’eau et enfin envoyer votre roman à vos bêta-lecteurs ?
Caractéristiques de Cali Keys : adore les palmiers, les Bisounours, les Piña Colada et les fraises Tagada.
Lieu de vie : Suisse après un passage en Californie et des études à Paris.
Déteste se mouiller les chaussettes dans la salle de bains, terminer une boîte de biscuits (y en a plus après) changer le rouleau de papier toilette et arroser les plantes.
Côté édition, elle a publié son premier roman Mon Ex me colle à la peau en 2013 avant de travailler avec des éditeurs comme Milady, Prisma, Charleston, AdA et Hauteville. Son roman, L’amour à pleines dents ! a reçu le prix Diva de la meilleure romance 2017.
Ses genres de prédilection? La romance, la new romance, le new adult, le feel-good et la comédie romantique.
Elle a publié onze romans (et ne compte pas s’arrêter, elle est trop accro) et aime partager sa passion en animant des ateliers d’écriture. Depuis plus de 8 ans, elle soutient et accompagne des primo-romanciers dans leur désir d’écrire.
Elle a également animé la masterclass Romance pour Kobo et participe régulièrement à des tables rondes et des conférences sur l’art romanesque.
Un article très utile.
Merci pour cet article très intéressant.