Portraits d'écrivains

Rencontre avec Reine Andrieu, lauréate 2020 du concours « Les Talents de demain »

Portrait photo de l'autrice Reine Andrieu, lauréate 2020

Reine Andrieu, qui a remporté la 4e édition du concours d’écriture « Les Talents de demain », a toujours baigné dans la littérature et les livres. A l’occasion de la parution au format papier de son roman L’Hiver de Solveig aux éditions Préludes, nous avons longuement conversé avec Reine. De son roman choral qui se situe sous l’Occupation, de sa participation au concours « Les Talents de demain », de son expérience de l’autoédition et de l’édition traditionnelle, mais aussi des lectures qui ont nourri son écriture, ses sources d’inspiration, les thèmes qui lui sont chers :  rencontre avec une voix de la littérature qui a des choses à dire !

A propos de l’écriture

  • Quand avez-vous découvert votre passion pour l’écriture ?
Photo d'une femme en train d'écrire sur son carnet

Assez récemment ! J’ai toujours eu du plaisir à rédiger, dans mes différentes professions (même des rapports administratifs !), mais je n’avais jamais écrit de fictions. Pas même une nouvelle. Je n’osais pas. Je ne me sentais pas légitime à pratiquer l’exercice. Lorsque j’étais bibliothécaire, je vivais au milieu de livres d’auteurs talentueux et mon admiration pour ces derniers étouffait dans l’œuf l’envie de prendre la plume, ne serait-ce que pour essayer.

  • Y a-t-il un livre en particulier qui vous a donné l’envie d’écrire ? Quels sont les auteurs ou les livres qui vous ont inspirés ?

Il n’y a pas « un » livre en particulier. Tous les auteurs m’inspirent, d’une manière ou d’une autre. Ils m’aident à définir ce vers quoi je veux tendre en tant qu’autrice, et l’inverse aussi, ce que je veux éviter, tout en gardant, bien sûr, mon style personnel. Je crois qu’il n’y a rien de pire que « vouloir faire comme… ». Mais une rencontre avec un auteur en particulier, Caryl Férey, alors que je travaillais en bibliothèque, a fait fondre mes dernières réticences. J’avais évoqué avec lui mon envie d’écrire et il m’avait dit : « Foncez ! Vous verrez, c’est génial ! Il faut oser ! ». Je l’ai écouté et je luis sais gré aujourd’hui de m’avoir décomplexée.

  • Où puisez-vous l’inspiration ? Quelle est votre astuce pour contrer l’angoisse de la page blanche ?

L’inspiration se niche partout : dans les personnes que vous croisez, les scènes de la vie quotidienne, l’actualité, l’Histoire, tout. Absolument tout ! Si parfois, en cours d’écriture, il me manque un élément pour rendre l’histoire pertinente, je mets mon texte de côté pendant quelques jours, durant lesquels j’en profite pour me documenter ou lire, et une idée surgit au moment où je m’y attends le moins. Quand vous êtes en situation d’écrire, votre cerveau fonctionne non-stop, même – surtout ? – à votre insu !

  • On peut dire que vous avez baigné dans la littérature de longue date puisque vous avez été bibliothécaire pendant treize ans. Pourriez-vous nous décrire ce que cela a pu vous apporter pour votre métier d’autrice ?

J’ai toujours lu. Cependant, le métier de bibliothécaire m’a sans doute amenée à lire des livres vers lesquels je ne serais pas allée spontanément, pour me permettre ensuite de conseiller les usagers. Je m’étais imposé une règle : découvrir au moins un auteur nouveau par mois pour élargir mon univers littéraire.

A propos du concours « Les Talents de demain 2020 »

  • Vous avez démarré en tant qu’autrice autoéditée avant de remporter la quatrième édition du concours d’écriture « Les Talents de demain » organisé par Kobo Writing Life en collaboration avec la Fnac et les éditions Préludes. Que retenez-vous de cette expérience ? Quel regard portez-vous sur l’autoédition ?

L’autoédition est une formule intéressante lorsque l’on écrit et que l’on veut progresser. Ainsi, vous pouvez publier, à moindre frais, et recueillir des avis et critiques constructifs de vos lecteurs. Cela dit, la promotion d’un livre autoédité est très limitée. C’est difficile et chronophage. Souvent décourageant. À moins d’être une star sur les réseaux sociaux, la diffusion plafonne rapidement. C’est en cela que j’ai trouvé la formule du concours très intéressante car elle a élargi considérablement mon lectorat. Le livre a été téléchargé plusieurs milliers de fois, dans une trentaine de pays. De nombreux lecteurs ont découvert mon travail avec le titre en concours et ont ensuite téléchargé mon tout premier livre. Je peux dire que même si je n’avais pas été lauréate, j’aurais considéré cette expérience comme réellement positive. Mais la cerise sur le gâteau, c’est bien sûr lorsque l’on m’a annoncé que j’avais gagné. Je n’ai pas de mot pour vous décrire ma joie ! C’était tellement inespéré ! Je n’avais écrit que deux romans et un éditeur – et non des moindres – décidait de me publier ! Je crois que c’est quelque chose que l’on savoure d’autant plus quand on a vécu l’expérience de l’autoédition.

  • Quels sont les avantages à être un auteur indépendant d’une part, et que vous a apporté le travail avec votre maison d’édition d’autre part ?

Je pense que tout dépend dans quel objectif on écrit. Si c’est plus pour soi, ou pour ses proches, l’autoédition représente un moyen formidable pour publier. C’est très souple, il y a des formules d’impression à la demande qui sont très pratiques et économiques. En revanche, si l’on écrit dans l’espoir d’être lu par le plus grand nombre, l’autoédition est un peu frustrante.

La maison d’édition Préludes m’a immédiatement plongée dans une ambiance très professionnelle. Qu’il s’agisse des ajustements à faire sur le roman, des corrections de toutes sortes, de la réalisation de la couverture, et ensuite de la promotion mise en place autour du livre… Avec une maison d’édition, votre texte est « pris en charge » et cela fait un bien fou ! J’ajouterai que travailler en collaboration avec les Éditions Préludes est un vrai plaisir, car à tous les stades j’ai eu affaire à des personnes très accueillantes et à l’écoute.

  • Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux auteurs souhaitant participer à la prochaine édition du concours « Les talents de demain » ?

Je leur dirais ce que Caryl Férey m’a dit, à moi, concernant l’écriture : « Foncez ! ».

Il n’y a pas grand-chose à perdre. Si le livre numérique est gratuit le temps du concours, cela ne constitue pas un gros manque à gagner. En revanche, c’est un excellent moyen de se faire connaître.

A propos de L‘Hiver de Solveig

Couverture du roman de Reine Andrien, L'Hiver de Solveig aux éditions Préludes
  • Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous plonger dans un roman historique se déroulant pendant la Seconde Guerre mondiale, source de tant de récits par ailleurs ? Ce qui pose inévitablement la question de la comparaison et peut entraîner une certaine pression…

C’est vrai que la Seconde Guerre mondiale est un sujet très prisé et déjà beaucoup traité. Cela dit, c’est un sujet qui en renferme des milliers d’autres, tant cette guerre est complexe. Je crois que la véritable pression réside, en tout cas pour moi, dans la crainte d’écrire des choses inexactes.

J’ai choisi ce sujet car il me passionne, notamment d’un point de vue humain. Et durant cette guerre, le meilleur et le pire de la nature humaine se sont exprimés, côtoyés. Voire le pire du pire, si l’on pense à la Shoah… Et puis il y a ces situations tout en contradiction : les libérateurs américains qui risquaient leur vie pour une juste cause, et dont certains se livraient, par ailleurs, au viol de femmes en Normandie ; ceux qui collaboraient avec l’occupant parce qu’ils n’avaient pas le choix, mais dont le cœur était du côté de la Résistance ; ou encore le sort de ces demi-juifs enrôlés dans la Wehrmacht. Les exemples sont légions durant cette période.

  • L’intrigue de votre roman se situant entre l’Occupation et la fin de la guerre, pouvez-vous nous dire comment vous avez procédé pour la phase de documentation, indispensable pour un roman historique ?

Je n’ai pas la prétention d’écrire des « romans historiques » du même registre que Ken Follett ou Clara Dupont-Monod, par exemple. J’écris plutôt des intrigues qui ont pour toile de fond une période historique donnée. Quoi qu’il en soit, la documentation est une phase préalable capitale : j’ai lu des livres, des articles de presse, écouté ou lu des témoignages, consulté une multitude de sources qui m’ont permis de recouper les informations et aussi de me plonger dans l’ambiance de cette guerre. Chaque situation a – normalement – fait l’objet de vérifications. Jusqu’à chercher, par exemple, comment travaillaient les gendarmes juste après la guerre. Cela m’a donné du fil à retordre d’ailleurs, car il y a peu d’informations sur le sujet.

  • Comment avez-vous abordé la construction de votre récit dans lequel se mêlent les points de vie narratifs parallèles et les flash-backs ?

J’ai construit ce roman un peu comme un puzzle. J’ai bâti un plan, au départ approximatif, qui constituait ma trame des différents chapitres et leur articulation. Ensuite, j’ai pris les chapitres dans le désordre, au gré aussi de l’évolution de ma documentation. Quand je me documentais, par exemple, sur les mischlinge, j’essayais d’écrire dans la foulée les chapitres où Günter s’exprime. Concernant l’intrigue, je devais veiller à ce que les éléments apparaissent dans le bon ordre chronologique, et à dévoiler la juste dose d’indices pour que le lecteur progresse dans l’histoire, tout en maintenant une forme de suspense pour qu’il ait envie d’aller jusqu’au bout.

Pour conclure…

  • Quelle pourrait-être la citation qui vous représente le mieux ?

Il y en a une que j’aime beaucoup, que j’ai puisée dans le livre de Colum McCann Lettres à un jeune auteur, quand j’ai commencé à écrire. Je l’avais imprimée en grand et affichée dans mon bureau :

« Il n’est qu’une sorte d’échec : ne pas savoir échouer. Le vrai courage est d’avoir essayé ».

  • Quelques mots de Reine Andrieu en vidéo

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